Zadig, Voltaire, 1748
Résumé de Zadig(ou La Destinée) Zadig a été publié pour la première fois en 1748, mais la version définitive a paru 8 ans plus tard, en 1756. Cette œuvre est un conte philosophique. Ce genre était très utilisé par Voltaire, avec notamment des œuvres
comme Candide ou
Micromégas. Le conte philosophique est un récit fictif ayant une portée philosophique et ayant pour caractéristiques d’avoir une morale, comme tout apologue.
Le vrai titre de l'oeuvre est
Zadig ou la destinée, et non simplement
Zadig.
Résumé de l'histoire Zadig est un jeune babylonien plein de qualités et comblé par la nature. Très optimiste, il ne cesse d’assurer que le bonheur est possible. Cependant, il ne va enchaîner que désillusion sur désillusion, tout d’abord en étant abandonné par deux fois par ses bien-aimées, Sémire et Azora. Déçu, il décide de changer son mode de vie et de se consacrer à l’étude des sciences, mais ce changement ne lui apportera guère plus de bonheur, Zadig étant accusé de mensonge puis de propos diffamatoires envers le roi. Grâce à son charisme hors du commun, il réussira néanmoins à se sortir des situations les plus difficiles en s’appuyant sur des analyses très pertinentes, et des démonstrations irréprochables. Après ces épisodes, Zadig devient le favori du roi Moabdar et de la reine, au point d’être nommé premier ministre du roi. Grâce à ses nombreuses qualités, il parvient à installer une politique éclairée permettant de régler de nombreux litiges. Malheureusement, en tombant amoureux de la reine Astarté, il va involontairement se condamner et doit fuir Babylone, afin d’éviter la vengeance du roi devenu jaloux. Zadig, un peu perdu, se met alors à errer et se rend en Egypte, où il devient esclave, après avoir tué un homme afin de se défendre. Rapidement, il devient l’ami et même le confident de son maître Sétoc, grâce à son habileté, sa science et sa sagesse. Cependant, les prêtres, en usant de leur pouvoir, condamnent Zadig à mort, lui reprochant d’être à l’origine de l’abolition d’une vieille coutume barbare. Cette fois-ci, il devra son salut à une veuve qu’il avait sauvée du bûcher, et qui lui permet de prendre la fuite et d’échapper à une mort certaine. De retour vers Babylone, afin de revoir Astarté, Zadig apprend que le roi est mort, et par chance, il retrouve sa bien-aimée, devenue esclave. Il parvient à obtenir sa liberté, et la reine peut ainsi faire son retour à Babylone. Des combats sont instaurés afin de désigner celui qui se verra en droit de l’épouser et par conséquent de devenir le nouveau roi de Babylone Avec une déconcertante facilité,. Zadig remporte le tournoi, mais victime d’une (nouvelle) injustice, il est devancé sur le trône. Dépité, il rencontre alors l'ange Jesrad qui lui révèle une partie des mystères de la Destinée. Zadig décide alors de revenir au palais, et toujours grâce à ses talents intellectuels et oratoires, il parvient à monter sur le trône et à épouser Astarté. Babylone devient alors une ville prospère, mais Zadig, marqué par ses aventures, s’interroge sur le sens de la vie humaine.
PERSONNAGES PRINCIPAUX Zadig est le héros de ce conte. Jeune, intelligent, instruit, riche et beau, cet homme ne semble souffrir d’aucun défaut, ce qui semble l’aider dans la conquête du cœur des femmes: en effet, dans ce livre, il connaît plusieurs fois l’amour avec Sémire, Azora et la belle Astarté. Son raisonnement et sa sagesse font de lui un homme sortant du commun et capable de se sortir des situations les plus compliquées, et sa grande générosité permet à ses proches de profiter de son aide. Sa très forte amitié avec le roi Moabdar va se dégrader à cause de l’amour qu’il éprouvera pour sa femme, Astarté, le poussant à fuir. Au cours de l’histoire, ce personnage a beaucoup voyagé et a transmis son savoir à un grand nombre de personnes, tel que Sétoc, mais aura aussi su profiter de l’aide des autres , spécialement de l’ange Jesrad, mais aussi de son ami Cador.
Moabdar est le puissant roi de Babylone, un homme fier de son pays, généreux et aimé de son peuple. Il aime prendre conseil auprès de celui qu’il a nommé premier ministre, Zadig . Malheureusement, son défaut est d’être très jaloux, et lorsqu’il se rend compte que Zadig et sa femme s’aiment, il deviendra méchant et sera même désireux de tuer ces deux personne en qui il avait pourtant confiance. Sa rencontre et son amour avec la belle mais capricieuse Missouf marqueront son déclin irréversible ainsi que celui de Babylone, et il sera tué lors de l’invasion de son royaume.
La reine Astarté est une femme douce et d’une beauté impressionnante. Marié au roi Moabdar, elle aime son mari jusqu’à sa rencontre avec Zadig dont elle tombe éperdument amoureuse. Contrainte de quitter Babylone pour survivre, elle restera cachée par Cador, mais sera ensuite vendue comme esclave avant de retrouver Zadig et de revenir à la tête de Babylone. Cette femme incarne la femme fatale, belle, mais qui cause de nombreux problèmes dont l’adultère.
STRUCTURE DE L'OEUVRE La plus grande partie de l’histoire se déroule dans la ville de Babylone, au Moyen-Orient, dans le palais royal. Cependant, Zadig voyage beaucoup durant l’histoire, se déplaçant en Egypte, avant de revenir dans sa ville de Babylone. De Babylone en Egypte, nous pouvons ainsi rencontrer avec le héros tour à tour les splendeurs mythiques de l'Orient et les duretés de l'esclavage dans le désert.
L’histoire semble se dérouler en l’an 837 de l’Hégire, soit en 1459. Cependant, les indices temporels sont très peu présents dans cette histoire, et il semble difficile de dater l’époque exacte de ce roman. En effet, dès la dédicace, l'anachronisme est patent; plus loin le mazdéisme et l'islamisme voisinent avec un tournoi médiéval. Le ton proprement voltairien consiste à nous persuader qu'il ne faut pas prendre tout ce décor au sérieux: la désinvolture de l'anachronisme le plus provocant, des citations visiblement inventées font l'amusement de ce pastiche.
LE NARRATEUR Dans ce livre, le récit est raconté à la 3ème personne, et le narrateur est omniscient. En effet, celui-ci semble tout savoir des personnages et est même informé de ce qui attend les personnages, annonçant à l’avance certains éléments comme lorsqu’il dit « cette petite faute, si c’en est une, fut la cause des plus horribles infortunes » au chapitre intitulé « les disputes et les audiences ». L’emploi de ce narrateur omniscient laisse penser au lecteur que les réflexions faites par celui-ci viennent directement de Voltaire, et par conséquent, permet à l’auteur de mieux transmettre ses idées et son point de vue.
ZADIG : UNE OEUVRE DES LUMIERES Voltaire, réputé pour ses critiques envers la société, nous offre une fois de plus une conte très polémique, dénonçant de nombreuses injustices, et reprenant les idées des Lumières, idées que soutenait ce philosophe. Comment, à partir d’un récit fictif, explique-t-il son point de vue, et met-il en place les principes de ce mouvement ?
Tout d’abord, après lecture de l’oeuvre, on remarque que le but de ce livre est principalement de porter un regard et d’émettre un jugement sur l’homme et sur la vie, en somme d’exercer un esprit critique. En effet, à travers le personnage de Zadig, qui semble tout savoir et être parfait, Voltaire cherche à montrer un idéal pour l’humain, un homme juste et droit. Zadig apparaît comme quelqu’un sachant tout ce qu’il y a à savoir de la vie. Voltaire établit ainsi une relation avec l’Encyclopédie que le personnage semble incarner, ce livre phare du siècle des Lumières rassemblant toutes les connaissances, spécialement dans le domaine des sciences, domaine dans lequel Zadig semble incollable. A travers ce personnage, Voltaire imagine donc une société heureuse et harmonieuse. Cependant, la présence de l’ermite, n’étant autre que l’ange Jesrad, démontre que même un personnage comme Zadig est loin de la perfection, ce « vieillard » expliquant que « les hommes jugent de tout sans rien connaître ». A travers ce personnage symbolique, Voltaire explicite sa philosophie de l’être humain. Il dénonce également l’abus de pouvoir de certains hommes se croyant en droit de tout faire, faisant référence au roi de France, que l’on retrouve en partie à travers le roi Moabdar, un homme trop fier, et qui, voulant assouvir ses désirs personnels, entraîne une déchirure sociale dans tout son royaume. De plus, les malheurs que rencontre le jeune Zadig démontrent combien la vie repose sur des inégalités. En effet, le héros est plusieurs fois accusé à tort à cause de son intelligence et de sa sagesse, ce qui apparaît comme paradoxal. Cette ironie de Voltaire a pour but de montrer que l’injustice est présente dans ce monde, et que certaines personnes semblent tirer profit de celle-ci.
Ces personnes, Voltaire tient à les dénoncer et c’est pourquoi, au chapitre 3, il s’attaque aux défauts de la justice qu’il juge trop coûteuse, donc inégale et surtout arbitraire. En effet, dans ce chapitre intitulé « le chien et le cheval », Zadig est accusé de mensonge envers le roi. Voltaire montre ainsi combien la justice est ferme et semble corrompue, celle-ci ne tenant pas compte de ce qu’avance Zadig lorsque celui-ci essaye de se défendre. Il oppose donc le fait que les juges n’utilisent pas la raison, alors que Zadig, plein de sagesse, argumente de manière remarquable sa défense. Voltaire recherche donc à travers cet épisode l’égalité et la justice pour tous, thème essentiel défendu par les Lumières. De plus, afin de mettre une fois de plus en valeur son idéal, Voltaire montre ce que serait une justice égale, lorsque Zadig devient ministre du roi, et qu’il effectue ses jugements non pas arbitrairement, mais en analysant chaque situation minutieusement, et en utilisant un raisonnement clair et logique, et par conséquent, forcément juste.
On constate également que Voltaire s’engage très fortement, en critiquant la société européenne, et en faisant la satire des mœurs et des institutions. En effet, à travers un récit a priori anodin, il dresse un véritable réquisitoire contre l’Eglise, s’attaquant au nom de la raison au fanatisme religieux, qui entraîne l’intolérance. Le fanatisme religieux ne respecte pas les idéaux de Dieu, qui encourage la tolérance et la raison, mais n’est qu’un détournement de la religion, afin d’obtenir ce que l’on souhaite. Voltaire effectue sa dénonciation dans le chapitre « Les rendez-vous », dans lequel les prêtres décident de condamner Zadig à mort, pour avoir fait abolir une tradition, qui en elle-même aurait pourtant mérité des réformes bien auparavant tant elle est cruelle. De plus, Voltaire parsème ce conte de traits satiriques contre les rois, les courtisans, les financiers et les hommes d'église, afin de montrer au maximum son envie de voir le régime et l’organisation politique changer.
En conclusion, Zadig semble être un conte contre le bonheur, dans lequel Voltaire critique essentiellement la société française, notamment la justice et le fanatisme religieux, mais aussi l’abus de pouvoir. Reprenant la plupart des principes des philosophes des Lumières, notamment le notion de jugement, ainsi que le grand intérêt pour la nature et les sciences, ce texte est donc une véritable œuvre philosophique reflétant bien le siècle des Lumières. Cette tendance se confirme par un cadre oriental, faisant référence à l’ouverture de l’Europe au monde grâce aux voyages, à cette époque.