Grandeur et décadence de César Birotteau, Honoré de Balzac, 1865
Résumé de GRANDEUR ET DECADENCE DE CESAR BIROTTEAU :Grandeur et décadence, croissance et décroissance, tels sont, selon le narrateur de César Birotteau, les principes de tout être et de toute organisation. Il n'est pas de programme narratif plus limpide. Le récit s'ouvre, en décembre 1819, au faîte de la gloire du personnage éponyme, parfumeur et adjoint au maire du deuxième arrondissement de Paris ; il se clôt sur son décès.
Il ne faut pourtant pas faire fi des tribulations de ce Christ de boutique, martyrisé sur la croix. Cette décoration inspire au futur Chevalier de la Légion d'honneur les dépenses somptuaires d'un bal et lui donne un vertige d'ambition qui l'amène à risquer toute sa fortune. Ruiné par Sarah Gobseck, le notaire Roguin flaire en Birotteau une dupe potentielle. Le notaire déchu entraîne son « ami » dans sa débâcle : il s'entremet auprès de lui dans une affaire de spéculation immobilière, s'empare de toutes les économies du parfumeur qui ne lui avait pas demandé de reçu, et fuit à l'étranger.
Du Tillet, ancien employé de César congédié pour vol, et maintenant admis dans les hautes sphères de la Banque, est l'instigateur caché de cette escroquerie. Mû par un désir de vengeance, il achève de perdre Birotteau en sapant son crédit auprès des banques avec l'aide desquelles le parfumeur aurait pu se tirer de ce mauvais pas. Cependant César, soutenu par le dévouement de son oncle Pillerault, de sa femme, de sa fille, de son commis Popinot qui, aidé du génial vendeur qu'est Gaudissart, commercialise son huile céphalique, aidé enfin par les six mille francs qu'offre Louis XVIII à ce vieux et fidèle royaliste, rembourse tous ses créanciers, est réhabilité en 1823 et reprend sa Légion d'honneur. Mais terrassé par tant d'émotion, il meurt au jour de son triomphe.
Cependant la probité de Birotteau est également l'agent de sa mort anticipée : il s'est tué à rembourser tous ses créanciers alors que ce n'est pas l'usage. César Birotteau, c'est d'après Balzac la « bêtise de la vertu » (Faux départ de 1833, Pl., VI, 1120)
Lectures et commentaires : L'histoire de César Birotteau (le texte) est particulièrement éclairante pour suivre l'évolution du roman balzacien et pour la gestion de l'ensemble Comédie humaine, incluant cette autre version, tragico-burlesque des « souffrances d'un inventeur ». La gestation exceptionnellement longue de ce roman, entre les faux départs de décembre 1832 et la première édition chez Boulé en décembre 1837, s'explique par une série de changements d'éditeurs dont les renoncements successifs laissèrent ouvert un chantier que Balzac, sans leur contrainte, n'arrivait pas à clore. Essentielle également est la transformation de l'étude philosophique (César, victime de la pensée qui tue, vecteur de cette catégorie de texte) en scène parisienne, laquelle imposait d'autres développements et un « réalisme » plus grand. Dans le Furne corrigé la révision a encore été particulièrement active et les retouches relativement nombreuses. La plupart sont d'ordre stylistique et tendent à accentuer l'orientation dramatique du texte. Ainsi, Balzac supprime plusieurs alinéas, dans une même réplique, et les remplace par des tirets : l'enchaînement discursif gagne ainsi en rapidité. Inversement, l'alinéa, lorsqu'on l'ajoute, isole et met en relief certaines phrases particulièrement pathétiques. L'inflation des majuscules contribue par ailleurs à la promotion de l'hyperbole et de la personnification, souvent à des fins ironiques. Enfin, par son usage des déterminants, des pronoms et des appellatifs, Balzac systématise la typisation : le pronom, l'adjectif possessif et le nom propre sont souvent écartés au profit d'un appellatif évoquant la catégorie sociale à laquelle appartient le personnage. Substitué au possessif, le démonstratif généralise et donne au récit une portée didactique.
Néanmoins les principales métamorphoses du roman sont intervenues au moment de la relecture et de la correction des épreuves. Considérables, elles touchent à l'architecture même du roman : ajouts et transpositions mettent en évidence la dimension symbolique de l'oeuvre en accusant les contrastes (scènes et personnages). Nombre de retours en arrière et de digressions disparaissent. Grossissant les chiffres du passif et du redressement, allongeant la durée des souffrances de Birotteau, Balzac accuse la tonalité pathétique du récit.