Je n'ai plus que les os, un squelette je semble,
Decharné, dénervé, démusclé, dépoulpé,
Que le trait de la Mort sans pardon a frappé;
Je n’ose voir mes bras que de peur je ne tremble.
Apollon et son fils, deux grands maîtres ensemble,
Ne me sauraient guérir, leur métier m 'a trompé;
Adieu, plaisant Soleil ! Mon œil est étoupé,
Mon Corps s’en va descendre où tout se désassemble.
Quel ami, me voyant en ce point dépouillé,
Ne remporte au logis un œil triste et mouillé,
Me consolant au lit et me baisant la face,
En essuyant par la Mort endormis ?
Adieu, chers compagnons ! Adieu mes chers amis!
Je m’en vais le premier vous préparer la place.
Ronsard, Derniers vers, 1585