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 Pierre Corneille, Le Cid

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jenninou
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jenninou


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MessageSujet: Pierre Corneille, Le Cid   Pierre Corneille, Le Cid EmptyMar 24 Juil - 16:26

Le Cid (1636), Corneille
Acte I, scène 6


Don Rodrigue

Percé jusques au fond du cœur
D'une atteinte imprévue aussi bien que mortelle,
Misérable vengeur d'une juste querelle,
Et malheureux objet d'une injuste rigueur,
Je demeure immobile, et mon âme abattue
Cède au coup qui me tue.
Si près de voir mon feu récompensé,
O Dieu, l'étrange peine !
En cet affront mon père est l'offensé,
Et l'offenseur le père de Chimène !

Que je sens de rudes combats !
Contre mon propre honneur mon amour s'intéresse :
Il faut venger un père, et perdre une maîtresse :
L'un m'anime le coeur, l'autre retient mon bras.
Réduit au triste choix ou de trahir ma flamme,
Ou de vivre en infâme,
Des deux côtés mon mal est infini.
Dieu, l'étrange peine !
Faut-il laisser un affront impuni ?
Faut-il punir le père de Chimène ?
Père, maîtresse, honneur, amour,
Noble et dure contrainte, aimable tyrannie,
Tous mes plaisirs sont morts, ou ma gloire ternie.
L'un me rend malheureux, l'autre indigne du jour. (phrase de grammaire)
Cher et cruel espoir d'une âme généreuse
Mais ensemble amoureuse,
Digne ennemi de mon plus grand bonheur,
Fer qui causes ma peine,
M'es-tu donné pour venger mon honneur ?
M'es-tu donné pour perdre ma Chimène ?
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jenninou
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MessageSujet: Re: Pierre Corneille, Le Cid   Pierre Corneille, Le Cid EmptyJeu 9 Aoû - 18:02

Nous avons affaire à des stances délibératives, il s'agirait de voir comment elles s'insèrent dans l'action dramatique de la pièce.

En effet, les stances de Rodrigues ont été largement critiquées par les Classiques à l'époque de la 1ère représentation de Le Cid puisque, pour eux, les stances - trop poétiques- suspendaient l'action, faisaient redescendre la tension dramatique. Il est vrai que par leur nature même, les stances sont poétiques et l'on pourrait se demander pourquoi ce choix hasardeux de la part de Corneille?
Les stances sont un ensemble de strophes hétérométriques : il y a rupture ici avec le rythme régulier de l'alexandrin. Corneille a dit qu'il avait choisi l'hétérométrie afin de faire ressortir l'émotion de son personnage : l'hésitation, la peine....
Malgré tout nous pouvons repérer ici un rythme régulier de forme:
8 A
12 B
12 B
12 A
12 C
6 C
10 D
6 E
10 D
10 E

Avec une sorte de refrain (il y a des variantes donc parler de refrain est peut-être présomptueux : "Ô Dieu, l'étrange peine" et les deux vers suivants) dans lequel "peine" rime avec "Chimène". Rien qu'avec cette observation nous pouvons voir que l'amour de Rodrigue est un amour déçu.

Le rythme régulier des stances de Rodrigue mettent en valeur la visée délibérative (et donc argumentative) du discours du héros : doit-il obéir au code de l'honneur et venger son père? doit-il obéir aux lois de l'amour?
A regarder de plus près le discours de Rodrigue, nous savons déjà quel choix il va faire. Le champ lexical de la vangeance, de l'honneur est très présent, le nom de sa bien-aimée rime avec le vocabulaire de la peine, de la tristesse.
De plus, dans la conception cornélienne de l'amour (qui se rapproche de la fin'amor médiévale), le héros ne doit-il pas mériter l'amour de sa dame par son honneur? Ainsi, venger son père s'est perdre Chimène, mais ne pas le venger s'est ne plus mériter l'amour de sa belle et donc, le perdre pareillement. Il est donc évident que Rodrigue vengera son père et essaiera de reconquérir Chimène par les exploits guériers. Le substantif "fer" ("Fer qui causes ma peine)indique à la fois la vengence, et la reconquête....cette même épée que son père lui tendait à la scène précédente ("Va, cours, vole, et nous venge") est le symbole à la fois de l'affront fait à son père, de la noblesse et de son code d'honneur. Symbole donc, bivalant.
Mais la force de ce fer, réside non seulement dans son symbolisme, mais aussi dans sa présence physique. Il y avait peu d'objet scénique et la présence de l'épée comme lien entre le père et le fils, mais aussi comme un fil conducteur de la pièce est très marquant visuellement.

Nous voyons donc que ses stances délibératives (regarder le nombre d'intérogations, de marqueur d'alternative "ou....ou") servent à Rodrigue d'auto-persuasion (il sait déjà ce qu'il doit faire mais hésite à le faire) et indiquent au lecteur-spectateur quel sera le choix du héros....c'est là la force argumentative des stances, mais aussi leur force dramatique. Ces stances poétiques pour traduire l'émotion du héros, (ses hésitations, ses peurs, ses désillusions...) ont une répercution sur la suite de la pièce et ont donc une utilité dramatique (ne serait-ce que par l'objet-outil qu'est l'épée). Il s'agit d'une suspension de l'action, certes, mais qui sert à renforcer la tension dramatique.
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